La Chambre
de Simon Lambert

critiqué par Libris québécis, le 16 janvier 2015
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
La crainte de devenir adulte
S’introduit-on ou tourne-t-on le dos au monde des adultes ? En fait, le roman partage le questionnement du Misanthrope de Molière. Comme Alceste, le héros plaide pour une sincérité absolue en toutes circonstances.

Le monde est mensonge, croit-il, voire cruel. Et personne ne semble apte à interpréter ce que le héros fait. Joue-t-il au bridge qu’on l’accuse de tricherie. Fouille-t-il dans la bibliothèque d’une amie de sa mère qu’on l’incrimine d’avoir voulu en abîmer les livres. S’amuse-t-il au ballon qu’on s’en empare. Ces incidents ébranlent sa perception de lui-même. Serait-il un faible ? Il s’emmure dans une chambre à peine éclairée pour réfléchir à sa situation. Espère-t-il ainsi mieux voir dans son jeu. Pour y arriver, il confine ses réflexions sur des feuilles qui ont déjà servies, tout en se privant de tout contact avec l’extérieur hormis Martha, qui lui apporte ses repas. Même là, il refuse les repas qu’elle lui apporte. Le vide total pour découvrir la plénitude de son être. Que lui apportera cette retraite fermée ? Voilà le dilemme. En conclura-t-il au cynisme d’une humanité peuplée de Judas ou d’apôtres Pierre prêt à le renier ? Existe-t-il des Josephs d’Arimathie pour l’aider à porter sa croix ? Martha n’aurait-elle pas été ce personnage dévoué, dont il aurait refusé l’aide ? Autant de questions auxquelles le héros s’applique à répondre pour sortir du tombeau qu’il s’est construit. Bref, parviendra-t-il à vivre son jour de Pâques ?

Outre Simon Lambert, né en 1982, de nombreux jeunes auteurs ont abordé cette thématique dans des romans qui fouissent les profondeurs du cœur afin d’en tirer la quintessence de l‘âme. Celui de l'auteur s’élève au-dessus du nombrilisme en choisissant une ossature très originale et très peaufinée, qui sent, tout de même, l’exercice littéraire parrainé par un professeur, en l’occurrence Alain Beaulieu qui enseigne à l'université Laval de Québec. Oeuvre labyrinthique écrite avec une plume peu pédagogique. C’est beau, c’est intéressant, mais la mécanique romanesque s’exerce aux dépens d’une écriture plus personnelle et plus engagée socialement.